Qui a écrit la Bible ?

Voilà une question bien moderne que le plus audacieux des exégètes n'aurait pas osé poser jusqu'au XVIIe siècle. En effet, les traditions juive puis chrétienne attribuaient sans hésiter les principaux livres de la Bible à des auteurs illustres.

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L'évidente clarté des traditions

Les Clés du Paradis ?

Selon ces traditions, Moïse aurait lui même écrit le Pentateuque (ensemble de 5 livre constitués de la genèse, l'Exode, le Lévitique, les Nombres et le Deutéronome.), le roi Salomon serait l'auteur du Cantique des cantiques, des proverbes, de l'Ecclésiaste, et les évangélistes Matthieu, Luc, Marc et Jean ceux des textes qui portent leur nom.

Certaines parties de la Bible débutent par les expressions : « les paroles de Néhémie » un personnage du livre de Néhémie qui fait partie de la Bible hébraïque, « la vision d’Isaïe » un prophète de l'Ancien Testament, et « la parole de Dieu qui vint à Joël » le deuxième des douze petits prophètes de la Bible. La plupart des rédacteurs de la Bible affirment avoir écrit au nom de Dieu, et/ou sous sa direction. Les prophètes qui ont rédigé les Écritures hébraïques utilisent plus de 300 fois l’expression « Voici ce qu’a dit Dieu ». D’autres écrivains bibliques ont reçu le message divin de la bouche d’anges, comme Zacharie (père de Jean le Baptiste).

Plus d'une quarantaine d’hommes ont participé à la rédaction de la Bible sur une période de 1 600 ans. La Bible est une bibliothèque miniature qui compte pas moins de 66 livres. Les 39 premiers manuscrits forment les Écritures hébraïques (connues sous le nom d’Ancien Testament), et les 27 derniers les Écritures gréco-chrétiennes (appelées aussi Nouveau Testament).

La Bible était perçue comme la simple mise par écrit d'épisodes ou d'expériences le plus souvent vécus par leurs rédacteurs.

Des incohérences logiques

C'est au XVIIe siècle que le philosophe Baruch Spinoza remet en cause cette vision des choses. Adoptant une lecture rigoureusement rationaliste des textes sacrés, il pointe des incohérences qui lui semblent être la preuve que la tradition se trompe. Ainsi, remarque t-il que l'attribution du Pentateuque à Moïse est peu crédible puisque le texte s'achève sur sa propre mort. Comment Moïse aurait-il pu rédiger le récit de sa disparition ? Spinoza initie un mouvement de lecture critique des écritures qui bouleverse bien des certitudes. Pour autant, renoncer à la tradition pose un problème de taille: il s'agit désormais d'essayer de percer le mystère des véritables auteurs de la Bible.

Une thèse trop séduisante pour être exacte

Au XIXe siècle, certains philologues croient pouvoir distinguer dans l'Ancien Testament des styles différents, qui définissent autant d'auteurs. On parle alors de deux principaux rédacteurs: le « Yahviste » et « l'Elohiste », ainsi nommés car le premier utilise uniquement le nom de Yahvé pour désigner Dieu, le second celui d'Elohim. Cette thèse séduisante est abandonnée dans les années 1970 au profit d'explications plus complexes encore.

Changement de questionnement tant pour l'ancien...

En effet, en ce qui concerne l'Ancien Testament, les exégètes modernes déplacent les termes du questionnement, préférant le « quand a-t-on écrit ? » au « qui a écrit ? ». Il apparait en effet que la Bible juive, est un ensemble composite de textes rédigés, parfois à diverses reprises, au cours du Ier millénaire avant Jésus Christ. Il est fort probable qu'il ne soit pas revenu à une seule personne d'écrire ces textes. Ainsi, les critiques modernes pensent que les livres des Rois ont été composés, non par le prophète Jérémie, mais par un auteur qui aurait puisé ses sources dans les annales royales de Juda et d'Israël. De même, les écrits prophétiques n'auraient pas été écrits par les prophètes eux mêmes mais par leur entourage.

La Bible rassemble une collection d’écrits divers et variés
dont la rédaction s’est échelonnée entre le VIIIe siècle et le IIe siècle avant Jésus-Christ

Le pentateuque qui relate des récits du IIe millénaire avant Jésus Christ n'a probablement connu sa rédaction finale qu'au VIe siècle avant Jésus Christ. En outre, il faut considérer que les auteurs de ces textes ont pu puiser non seulement dans des sources écrites antérieures à eux mais également dans une tradition orale dont nous n'avons aujourd'hui plus aucune trace. Ainsi, plus la recherche progresse, plus la perspective de savoir qui a écrit cette partie de la Bible s'éloigne.

... que pour le Nouveau Testament

Le problème est un peu différent pour le Nouveau Testament puisque chaque Évangile se réclame d'un auteur unique. Mais, là encore, les conjectures l'emportent sur les fait avérés. Ainsi, L'évangile de Jean, le seul des quatre évangélistes à avoir été apôtre et à avoir connu directement Jésus, serait en réalité le produit d'élaborations successives dont nous ne connaissons rien. Autre problème posé par ces documents: rédigés à la fin du Ier siècle après Jésus Christ, ils relisent le message de Jésus à la lumière de la situation du christianisme un demi siècle après la mort du messie. Ainsi, depuis plus de trois siècles, poser la question des auteur de la Bible revient à s'attaquer à l'un des problèmes les plus ardus de l'exégèse.

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Qui a écrit la Bible ?
William'SK - © Gaïa Esotérica

Bibliographie et Sources
Collectif, Les Grandes Énigmes de l'humanité, Éditions Larousse, Paris, 2004.
Richard Elliott Friedman, Qui a écrit la Bible ?, Éditions Exergue, s.l., 2012.
Illustrations : Garry Gay, Love reading, Saatchi Art.